LOU

dimanche 27 janvier 2019, par par Armelle Verrips

Lou

Si je te croisais dans la rue avec ton sac et tes baskets, je n’imaginerais pas

que tu sais tracer des lignes comme des pas sur le sol,

qu’à partir des lignes tracées, tu vas déployer tes poignets.

Et quand tu changes de chaussures et que ton corps tout entier se met en mouvement, je ne sais pas encore qu’une robe de danse baroque se cache dans ton sac.

La musique résonne et la lumière s’y rajoute, je me surprends à voir enfin le décor de ce salon d’honneur de la mairie d’Armentières et je ne sais plus vraiment à quelle période cet instant appartient.

Ta mère te rejoint sur scène pour lacer le dos de ta robe. Ton corps qui est aussi le sien. Sa compagnie de danse dans laquelle tu as grandi. Vos deux sourires dans un pas de deux intimement liées à la lignée de femmes qui vous précèdent sûrement pour s’approprier le passé dans le présent. Chercher non pas à revenir mais faire un autre pas.

Ton père à travers tes mots et la voix qui chante la danse que tu danses. Puis Louis Quatorze se mêle à l’histoire. La danse qui à l’époque n’était dansée que par des hommes. Tes révélations de toi. Ta timidité et ta fougue. Une ronde qui devient un cri. Une puissance qui transcende les temps et les genres. Je pleure de rage et de bonheur à te voir t’approprier ton corps qui à cet instant est un corps de femme et d’homme. Je ne sais plus trop qui tu es parce que tu es beaucoup plus que ce à quoi j’aurais pu m’attendre, beaucoup plus grande que j’aurais pu l’imaginer, et alors je te regarde juste éblouie, heureuse de t’avoir vue ne serait-ce qu’un instant qui semblait infini.

Un portait chorégraphique comme une rencontre où au fur et à mesure des heures, des jours, et parfois des années, une personne se déploie devant nous. La personne prend de plus en plus de place dans notre cœur et dans nos souvenirs et on n’arrive plus à imaginer que cette personne aurait pu rester une passante de notre quotidien.