Labourer

dimanche 27 janvier 2019, par par Pascale Logié

Madeleine nous interprète une danse où seule la figure féminine paraît pour être initiée. Dans un accomplissement où l’homme pourrait paraître exclu si ce n’est par son absence évoquée dans sa plainte amoureuse. Madeleine ne revêt pourtant pas la figure d’extase et les phases plus agitées de sa danse ne sont jamais transe. Jamais elle ne s’abandonne, aussi le déshabillage n’est pas dépouillement mais passage.
L’occurrence répétée de ses mains rouges comme représentation du cycle menstruel fait écho au rituel agraire figuré par les frappes de ses bottines noires. Noire comme le simple T-shirt, legging qui dessine sa frêle silhouette, les joues rouge comme figure innocente de la jeune paysanne au labeur.
Par la communion avec la nature, l’expérience physique proprement féminine de la vie se fonde par la rencontre tellurique de la danse : faire l’amour avec la terre.
C’était il y a un an
Et je revois ce solo attendu.
La puissance et la forte présence de Madeleine sont amplifiées par le son des tambours battants démultipliés sur les contours du plateau. Scénographie minimaliste du tapis de danse immaculé et d’un rideau bleu de France en angle fond de scène côté cour, une ampoule rouge ponctue cette installation.
Est- ce cette image ou les pas à la mécanique militaire qui m’ont fait surgir la figure épique de Jeanne d’Arc ? La personnification de cette icône populaire à l’image de la paysannerie, le regard illuminé de la vierge habitée par une mission divine. La figure conquérante et déterminée allant de l’avant d’un pas affirmé. Claque les talons, se battre contre d’invisibles démons. Les traversées franches des directions du plateau s’effectuent avec le port altier.
Figure pantomimique à la Buster Keaton, elle joue tant du burlesque que d’une danse aux accents baroques et à la gestuelle contemporaine assurée en interaction aux pulsations des percussions. N’hésitant pas à sortir du champ de la scène, se risquant à la proximité frontale du public. Le regard franc.
La silhouette longiligne sombre laisse place à la projection d’un film documentaire sur la croissance des plantes. Je retiendrai le sommeil des pâquerettes. Elle ne profite pas de ce temps et opte pour un changement à vue mise à nue. Costume virginal pour le chant final ode à la terre nourricière, amour déchu amour déçu complainte laconique d’une danseuse héroïque.